On pourrait croire naïvement que les enfants
affectionnent les histoires de princes et de princesses,
c’est la première chose qui vient à
l’esprit… mais j’en ai vu chérir
des poupées désarticulées, sales
de surcroît, des ours en peluche en partie décousus,
ou des monstres en plastique. Dans les jardins, d’autres
jouent avec un ver de terre ou poursuivent des insectes
; les plus sournois attachent un fil à la patte
des hannetons… Une jeune cousine italienne qui
avait la passion des fourmis les transportait dans des
petites boîtes, puis elle les libérait
dans la maison, au grand dam de ses parents qui, se
rendant à l’évidence, devaient reconnaître
qu’ils avaient sûrement fait pire autrefois.
Alors, pourquoi ne pas mettre en scène ces personnages
excentriques qui peuplent mon imaginaire depuis toujours
pour créer une cosmogonie bien spéciale
?
Il faut garder précieusement toutes ces mues
dont nous supposons nous être débarrassés
à jamais ; si l’on déchire les premières
pages du livre de notre vie, on ampute beaucoup de souvenirs.
Un ami, un très bon ami, m’a dit que lorsque
l’on traverse le miroir, tout continue et repart
de plus belle, comme une vis sans fin. Ça m’énerve…
mais je suis sûr qu’il a raison.
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