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Cinquante-cinq
scènes chimériques illustrées
d’un commentaire |
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Depuis l’aube des temps, comme le petit
Poucet avec ses cailloux, l’homme a semé
ses œuvres pour se souvenir et revenir
sur ses pas, pour que l’on n’oublie
pas qu’il a vécu, qu’il a
aimé, qu’il a souffert, avant de
rendre l’âme. Au fil des siècles,
et sans certitude, il s’est laissé
convaincre de la bienveillance de ce monde qui
lui offrait le gîte et le couvert. Qu’importe
ses créations, ses expériences,
ses imprudences, il a dû composer avec
le quotidien, des gestes simples, une pause,
un souffle court de vie dédiée
à son emprisonnement ici-bas. Peut-être,
est-il un golem qui construit, mais aussi dénature
sa propre existence, coupant chaque jour son
bois en se souciant de ce à quoi il pourra
servir, imprégné de cette terre,
base même de sa dépendance vis-à-vis
d’elle. À travers les âges,
d’Éric le Rouge aux cap-horniers
qui chatouillent la queue d’un continent,
il a circulé dans son sang. J’ai,
pour ma part, un faible pour le mystère,
une passion pour l’île de Pâques,
les alignements du Ménec ou pour Stonehenge
et ses pierres bleues dont Samuel Pepys écrira
: « Dieu sait à quoi elles pouvaient
servir ! » Et que dire des lignes de Nazca
ou des sceaux, à ce jour indéchiffrés,
de la civilisation de la vallée de l’Indus
!
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Parfois,
cette boule qui flotte dans l’univers
se fâche alors, la Méditerranée
déborde et le plus grand lac du monde
devient la mer Noire, le Vésuve entre
en éruption et Pompéi disparaît
sous la lave, un séisme et un raz-de-marée
ravage Lisbonne et c’est l’origine
de la sismologie. Du seigneur de jade de Palenque
à la Ville détruite de Zadkine,
je suppose qu’il faut sans cesse s’interroger
pour continuer à vivre. Sans curiosité,
l’homme n’évolue pas.
J’ai travaillé à cet album
en pensant à mon père, qu’importe
la dimension dans laquelle il se trouve à
présent. Il respectait la nature et pratiquait
l’écologie, comme monsieur Jourdain
disait de la prose, sans même le savoir.
Dans son jardin, véritable refuge des
papillons et des insectes, j’admirais
les cétoines vert bronze, les argus métallisés,
les paons du jour, les vulcains et bien d’autres.
Ils s’y délectaient du nectar des
fleurs, les chenilles y fabriquaient leur chrysalide
et les chauves-souris s’y rafraîchissaient
dans l’atmosphère douce des soirées
d’été. Je ne l’ai
jamais vu maltraiter ce lieu de vie incomparable
et je lui en suis reconnaissant, car il a éveillé
mes sens. Il n’a pas connu mes livres,
mais j'ai l'intuition qu'il guide vers moi des
ondes bienfaisantes ; j’aime à
penser que nos actes sont justifiés...
Certains se recueillent devant un marbre gravé
de deux dates et d’un nom, d’autres
restent au contact de la nature, comme les Indiens
de la région des totems qui se ressourcent
le dos contre un arbre. Il n’y a pas un
rêve pour tous, mais des rêves fragmentés
que le vent propage à l’infini. |
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Quelques
illustrations
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