L’enfant me fixait de ses grands yeux
étonnés. Sa mère le tirait
par la main, ils regagnaient un campement de
roulottes en bois peint, comme celles de Van
Gogh, installées sur un terrain verdoyant
derrière le canal de l’Ourcq. Elle
portait une longue jupe multicolore et un châle
frangé sur les épaules, une mousseline
retenait sur sa nuque ses cheveux bouclés.
Au printemps, ils disparaissaient, on les attendait
aux Saintes-Maries-de-la-Mer. Ils étaient
bohémiens, gitans, tziganes. J’avais
dix ans… Beaucoup plus tard, je découvris
le jazz manouche. Grâce à eux,
je m’endormais en écoutant Nuages,
Saint-Louis blues ou My serenade, Django Reinhardt
me berçait dans la nuit.
Il est écrit dans l’article 1er
de la Déclaration des droits de l'homme
et du citoyen de 1789 que les hommes naissent
et demeurent libres et égaux en droits,
et pourtant, aucune loi ne protège les
minorités. En 1974, pour la première
fois, un Gitan est élu au parlement européen.
Ceci donne la mesure du chemin qui reste à
parcourir. « Je ne suis ni Athénien
ni Grec, mais citoyen du monde »,
disait Socrate…
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