Mai 2009

 
Mai 2009 - Les lettres de Colette à Missy
 
 

Missy en "marquise de Morny" / Elle se faisait appeler «Max», fumait le cigare. Elle se suicida le 29 juin 1944 en mettant sa tête dans la gazinière. C'était Mathilde de Morny, la fille du duc de Morny.
 
Elle se faisait appeler "Max" ou "Oncle Max". Elle s'habillait en costume trois pièces, portait les cheveux courts sous le haut-de-forme et fumait le cigare. A la fin de sa vie, après avoir subi une hystérectomie et l'ablation des seins, elle ressemblait à un vieux monsieur désemparé. Elle se suicida le 29 juin 1944 en mettant sa tête dans la gazinière. C'était Mathilde de Morny, la fille du duc de Morny et la femme, très provisoire, du marquis de Belbeuf. "Missy", pour les intimes. Elle fut sans doute la femme la plus conspuée, insultée, vilipendée de la Belle Époque, qui tolérait les amours saphiques mais condamnait le travestissement. Et plus encore son spectacle. Lorsqu'elle monta, en 1907, sur la scène du Moulin-Rouge pour jouer un rôle d'homme dans une pantomime qu'elle avait écrite, "Rêve d'Égypte", le public hurla : "À bas les gousses !", la presse se déchaîna contre "cette désexuée au visage de plâtre mou", et le préfet de police Lépine fit interrompre les représentations. La momie dénudée qui sortait du sarcophage et tendait ses lèvres à Missy pour le baiser de la résurrection, c'était Colette. Elle avait 34 ans, se séparait de son mari et Pygmalion, Willy, pensait même à se tuer et cherchait un amour protecteur, "un compagnon fidèle et honnête". Ce fut la scandaleuse Missy. L'auteur des "Claudine", qui était déjà une ingénue libertine et ferraillait contre les conventions, partage alors son temps entre la comédie et l'écriture. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - José Castelar "fabricant de cigares cubains"
 
 
La Havane - Le Cubain Jose Castelar est entré mercredi pour la quatrième fois dans le livre Guinness des records en présentant un "Havane" de 43,38 mètres, lors de la clôture de la 29e foire internationale du tourisme à Cuba. C'est le cigare roulé le plus long du monde.
Agé de 65 ans et rouleur de cigare depuis 50 ans, il a pulvérisé cette année son propre record après n'avoir cessé d'améliorer sa création au fil des années. Il figurait déjà dans le Guinness Book en 2005 avec un cigare de 20,41 m de long. Jose Castelar a mis cinq jours, en travaillant quotidiennement en moyenne 10 à 12 heures, pour réaliser ce cigare qui, a-t-il précisé, n'est pas fait pour être fumé.
Il a reconnu qu'il n'était pas un fumeur impénitent, se contentant que d'un "puro" par jour. Cuba exporte annuellement pour 400 millions de dollars de Havanes dans 150 pays. (Source)
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Chaque année, un cigare plus long !
"millésime 2009 : 43,38 m"

 
Mai 2009 - Germaine Tillion
 
 

Née en 1907 à Allègre (Haute-Loire) ethnologue et historienne.
Résistante de la première heure.
Morte le 19 avril 2008 dans sa 101e année.
 
Disparue il y a un an, Germaine Tillion n'était pas de l'espèce qui, comme Valmont, "se lasse de tout". Jeune ethnologue à dos de mule dans les Aurès en 1935, résistante de juin 1940, déportée à Ravensbrück, observatrice déchirée de la guerre des "ennemis complémentaires" en Algérie, elle avait sondé l'horreur des hommes ("le versant atroce") sans renoncer à les aimer. "Je ne me suis jamais considérée que comme un simple témoin...", écrit-elle pourtant. Quel témoin, alors ! Qui arracha à la mort des dizaines de condamnés, se fit injurier par le général Massu pour avoir dénoncé la torture systématique en Algérie, mais aussi par Simone de Beauvoir pour n'en être pas devenue une "porteuse de valises". Toujours elle assuma - à la manière de Camus - sa "poignante tendresse pour [sa] patrie" et, partant, le tragique de sa position "centriste" ("entendons par là que je ne haïssais frénétiquement personne"), intervenant tant pour des "terroristes" algériens que pour des putschistes emprisonnés. La force de ces "Fragments de vie" ne tient pas seulement à l'héroïsme discret de Tillion, à la modestie lumineuse de son humanisme ou à la justesse de ses engagements. Elle tient d'abord à la révélation d'une méthode d'enquête et de réflexion née à l'épreuve d'une vie entière : cette idée, qui trouve sa source dans les villages chaouias d'Algérie, et se forgea dans l'univers concentrationnaire, qu'on ne devrait pas "observer les autres sans s'observer préalablement soi-même", ou bien que "les événements vécus sont la clé des événements observés". Lire la suite...
 

 
Mai 2009 - Nintendo, l'après Mario...
 
 
À Kyoto, les visiteurs du musée peuvent emporter avec eux leur console Nintendo. Après l'avoir chargée à une borne située près de l'entrée, ils se promènent, casque aux oreilles, écoutant sagement les descriptions des merveilles de l'art bouddhique exposées. Ce service est le dernier-né du groupe japonais, qui veut sortir sa console des sentiers battus des jeux pour en faire un compagnon de la vie quotidienne, un objet usuel comme le téléphone. Alors que Sony, Panasonic et les autres leaders de l'électronique japonaise trébuchent, Nintendo ignore la crise et affiche des performances record : il vient d'annoncer un profit de 2,1 milliards d'euros pour 14 milliards de ventes. Alors, pour une fois, la direction a montré le bout de son nez, à Tokyo en avril dernier, pour annoncer la nouvelle version de la DSi. Satoru Iwata (49 ans), le PDG un peu guindé, et Shigeru Miyamoto (56 ans), le créatif surnommé le "Spielberg du jeu vidéo", nettement plus décontracté, ont répondu à la presse. Ce tandem veille avec attention au destin de Mario, le héros fétiche des jeux vidéo de la maison. Un tantinet intimidées par les flashs, les deux têtes pensantes sont sorties de l'ombre. Car, bizarrement, très loquace pour promouvoir ses produits, Nintendo entretient le mystère autour de son fonctionnement interne. Rares sont les journalistes invités à son siège de Kyoto ou ayant interviewé ses dirigeants.
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Le groupe veut élargir l'univers de ses consoles à d'autres activités : carnet médical électronique, manuels pour lycéens… / d’après Shigeru Miyamoto / Mario le petit plombier
 

 
Mai 2009 - Destruction des halles de Baltard
 
 

Alphonse Allais avait imaginé le prolongement du boulevard Saint-Michel jusqu'à la mer. / Entre les deux guerres, le plan Voisin concocté par Le Corbusier prévoyait de raser le centre de Paris !
 
Alphonse Allais avait imaginé le prolongement du boulevard Saint-Michel jusqu'à la mer. Récemment Nicolas Sarkozy parlait d'un Grand Paris qui pourrait s'étendre jusqu'au Havre. Alphonse Allais disait aussi qu'il faudrait construire les villes à la campagne parce que l'air y est plus pur. La rurbanisation a donné corps à cette autre galéjade. Cinquante ans de politique du patrimoine, c'est cinquante ans de pilotage à vue entre réalisme et idéalisme, règles strictes et accommodements multiples. En créant un ministère pour André Malraux, le général de Gaulle a fait de la culture un élément essentiel du prestige de la France. Dans le prolongement des lois précédentes, la politique du patrimoine aura pour priorité la protection des plus beaux monuments. La loi de 1962 sauvegardera les quartiers historiques. Ainsi les centres-villes promis à destruction par la sainte alliance de l'utopie architecturale et de la rapacité des promoteurs pourront-ils être sauvés. Il faut se rappeler qu'entre les deux guerres le plan Voisin concocté par Le Corbusier prévoyait de raser le centre de Paris (Notre-Dame exceptée) pour y construire des tours disposées en damier... C'est Malraux également qui mettra en place un début de réglementation sur les fouilles et découvertes archéologiques et qui par la loi du 31 décembre 1968 sur la dation d'œuvres d'art en paiement de droits de succession évitera que de nombreux tableaux ne quittent le territoire national. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - Ampoules basse consommation
 
 
Recyclable, cinq fois moins gourmande en énergie que son aînée à incandescence pour une durée de vie dix fois plus longue : la lampe fluocompacte est présentée comme le Saint-Graal de l'écologie, l'écogeste minimal. À côté d'elle, l'invention d'Edison fait figure d'hérésie environnementale puisque la gloutonne restitue 95% de l'énergie électrique en chaleur - à l'heure de Kyoto, ça fait tache. Nous voilà donc priés de troquer nos bonnes vieilles ampoules contre cette lumière blafarde qui plonge le salon dans une ambiance de parking. Dès septembre prochain, les modèles à incandescence de plus de 80 W et les ampoules dépolies seront privés de rayon. Et, chaque année jusqu'en 2012, une catégorie de plus se verra refuser l'accès à nos supermarchés. Dans l'intérêt de la planète. Mais pas si vite! Car la lampe fluocompacte recèle de nombreuses zones d'ombre. Bien que "verte", elle pollue. Elle est même classée "déchet dangereux", car elle contient du mercure. Certes, 5 mg au maximum, soit 100 fois moins qu'un ancien thermomètre. Mais 5 mg multipliés par des millions d'ampoules jetées chaque année, cela ne fait pas très propre. Alors, en 2005, plus de vingt ans après les premières "basse conso", on a créé Récylum (www.recyclum.com), un organisme chargé de gérer la filière de recyclage. Selon Récylum, 93% du poids total de l'ampoule est recyclé... mais pas le mercure ni les poudres fluorescentes qui, eux, sont "neutralisés", c'est-à-dire enfouis dans des installations de stockage de déchets ultimes et stabilisés ! Plus inquiétant encore : en 2008, 31% seulement des lampes fluorescentes mises sur le marché ont été traitées. Ce qui laisse une bonne dose de mercure et de poudres dans les poubelles, dans la nature... Lire la suite…
 

Précaution ! … on brise une ampoule : ventiler la pièce, ramasser les débris avec un balai (pas d’aspirateur à cause des particules collées sur le filtre) / De la part du centre de recherche et d'information sur les rayonnements électromagnétiques ! Risque de maux de tête à moins de 30 cm, états dépressifs, difficultés de concentration, etc. alors, éviter la lampe de bureau !!! / "Mon nom, Edison"
"La lampe la moins dangereuse est encore celle qui est éteinte !" A.D.
 

 
Mai 2009 - Guadeloupe, les émeutes de mai 1967
 
 

Émile Ernatus, retraité de 63 ans, vit dans un appartement modeste de Morne-la-Loge. Les 26 et 27 mai, il va célébrer la révolte des esclaves de 1802.
 
Tout est bien rangé, comme souvent chez les retraités. Pas de poussière sur les meubles encaustiqués, pas de bazar sur la table. Émile Ernatus, jeune retraité de 63 ans, vit dans un appartement modeste de Morne-la-Loge. Alors que les 26 et 27 mai la Guadeloupe va célébrer la révolte des esclaves de 1802 et qu'une commission mise en place par Yves Jégo va tenter de faire la lumière sur la répression policière d'un autre 26 mai, en "Mè 67", cet ancien professeur de sciences économiques et sociales dans un lycée des Abymes a accepté pour la première fois de se raconter. Ses souvenirs frais et intacts font écho à ceux d'une île où les souvenirs de l'esclavage sont encore vivants, et où témoigner sur les violences de l'État reste encore un tabou. Émile Ernatus se souvient des histoires de sa mère couturière. "Mon grand-père paternel est né avant l'abolition de l'esclavage, en 1846. Ma mère, originaire de Pointe-Noire, nourrissait ses onze enfants de récits. Je me souviens qu'elle racontait l'histoire de cet esclave qui ne sentait pas les coups de fouet que lui donnait son maître, mais qui provoquaient en revanche une grande douleur chez son épouse. Ma mère disait aussi que dans les plantations, quand un enfant de maître mourait, tous les esclaves du domaine étaient obligés de saluer la dépouille avec la même formule : Aie aie aie, le petit maître est mort. Le commandeur de la plantation sonnait ensuite la fin des pleurs : Aie aie aie ti mèt mô. Assé pléré, laissé pou on ot ! (cessez de pleurer, gardez-en pour les autres occasions !)." Lire la suite...
 

 
Mai 2009 - Aung San Suu Kyi
 
 
Un don Quichotte américain éperdu d'admiration pour Aung San Suu Kyi a fourni à la junte birmane un prétexte inespéré pour durcir les conditions de détention de celle qui incarne depuis vingt ans l'aspiration du pays à la démocratie. Vétéran du Vietnam et mormon, John Yettaw, 53 ans, avait déjà tenté en novembre de prendre contact avec l'opposante assignée à résidence dans sa maison des rives du lac Inya, en plein cœur de Rangoon. Il souhaitait remettre à cette fervente bouddhiste une... Bible. Mais l'entourage du prix Nobel de la paix 1991 l'en avait dissuadé, soulignant les risques qu'une intrusion pouvait faire courir à Aung San Suu Kyi aux termes de la législation militaire. En vain. John Yettaw, revenu en Birmanie, a traversé dans la nuit du 3 mai le lac Inya pour se glisser dans la maison où vit la présidente de la Ligue nationale pour la Démocratie (LND). Après avoir été sur le point de le livrer à la police, elle a fini par autoriser Yettaw, qui disait souffrir de crampes, à dormir sous son toit. C'est lorsqu'il s'est remis à l'eau qu'il a été intercepté par la police et jeté en prison. Mais il a fallu plus d'une semaine aux généraux pour entrevoir tout le bénéfice qu'ils pourraient tirer de l'intrusion de celui qu'ils présentent comme un "élément subversif" et que les avocats d'Aung San Suu Kyi tiennent pour un "imbécile". Jeudi dernier, l'opposante, accusée d'avoir violé son assignation à résidence, a été arrêtée et transférée à la sinistre prison d'Insein, où croupissent une partie des 2100 prisonniers politiques de la junte.
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John Yettaw a fourni à la junte birmane le prétexte inespéré pour durcir les conditions de détention de Aung San Suu Kyi ! / John Yettaw. C’est à la nage aidé de palmes qu’il a traversé le lac Inya et a gagné la maison de Aung San Suu Kyi.
 

 
Mai 2009 - Ces réseaux… qui ont le pouvoir
 
 

Francs-maçons, énarques, blogueurs, gays. "Ils s'entraident pour faciliter leur ascension." / "L’homme est un animal social ! Les profs, les étudiants, les anciens élèves, les cuisiniers... tout le monde fonctionne en réseau." Jean-Robert Pitte, géographe
 
Sa disparition a révélé son existence. Depuis cinquante ans, les "22" se réunissaient une fois par mois. Recevaient chefs d'État et Premiers ministres, les conseillaient, les influaient. Rien ne devait sortir du cénacle, c'était la consigne. Au mois de décembre 2008, le Club des 22 s'est autodissous, faute de renouvellement. Ces membres Yves Guéna, Roland Dumas, Stéphane Hessel, ou un peu plus tard Gaston Defferre, étaient d'anciens résistants. Ils constituèrent, en 1958, un réseau parfait : un cercle refermé autour d'un intérêt commun - une conception gaulliste de la France -, menant une activité secrète et exerçant une influence sur le pouvoir. Aujourd'hui, les réseaux triomphent en France. Une tradition importée d'Angleterre au Siècle des Lumières. Logique, la société de l'Ancien Régime cantonnait les hommes à leur naissance et n'offrait que peu de possibilité d'ascension. "Or l'homme est un animal social, rappelle le géographe Jean-Robert Pitte. Les profs, les étudiants, les anciens élèves, les cuisiniers..., tout le monde fonctionne en réseau, c'est tout simplement humain." Il suffit de feuilleter l'annuaire d'Alain Marty "Réseaux d'influence. Le guide des clubs en France et dans le monde" (Ramsay) pour s'en convaincre. Le Club des Cent (gastronomie) ou des 40 (chefs d'entreprise quadras, fondé par Jean-Marie Messier), celui des croqueurs de chocolat ou des fumeurs de cigare, l'association des anciens d'HEC ou de Polytechnique, celle des Corses ou des Bretons... La mécanique est toujours la même : un centre d'intérêt commun qui peut parfois être un simple alibi.
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Mai 2009 - Johnny Hallyday, notre homme à Hongkong
 
 
La dernière fois qu'on l'avait vu dans un film en compétition, c'était en 1985, pour "Détective", film noir du "plus con des Suisses prochinois" (Godard, dixit Debord). Cette année, il y sera pour "Vengeance", le nouveau thriller du "plus frappant des Chinois de Hongkong" : la rencontre de Johnny H. et de Johnnie T. est un événement. L'histoire de "Vengeance" ? Un père débarque à Hongkong pour venger sa fille, victime de tueurs à gages. Sur son passeport, on lit : "cuisinier". Vingt ans plus tôt, il était tueur professionnel. Aujourd'hui, il perd la mémoire et doit faire au long de sa quête des polaroids de tous ceux qu'il croise, pour ne pas oublier qui sont les amis, qui les ennemis. Le style To (vingt ans de carrière et quelques sommets : "The Mission", "Breaking News" et "Élection 1 et 2") ? Virtuosité des cadrages, science du découpage, maîtrise de l'action et violence chorégraphique. Ses influences ? La tension lente de Melville, les ralentis explosifs de Peckinpah, la violence rédemptrice de Chang Cheh - qui ont en partage le code de l'honneur et l'amitié virile. Répliques cultes ? "On aurait dû tuer le Blanc", "I'm a total stranger here", "Who are you ? A chef". Dans "Vengeance", Johnny s'appelle Costello, comme Alain Delon dans "le Samouraï". La lourde pluie tropicale a remplacé le crachin parisien, les néons de Kowloon, les lampadaires des Champs-Élysées et les triades, le milieu.
 

" Vengeance" un thriller signé Johnnie To
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Johnny, borsalino, trench noir Burberry (modèle court), cravate anthracite, visage en lame de couteau, les yeux bleu gitane presque bridés à force d'être fatigués, est un samouraï errant impeccable. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - "L’enfer" de Clouzot (1907-1977)
 
 


Personne n'a vu ce film où le cinéaste dirigeait Romy Schneider et Serge Reggiani. "185 bobines de pellicule gisaient depuis quarante-cinq ans dans un entrepôt." Recomposé et présenté à Cannes cette année 2009.
 
C'est un naufrage magnifique : "l'Enfer", avant-dernier film d'un des plus grands réalisateurs français, Henri-Georges Clouzot, n'a pas été achevé, n'a jamais été vu, et les 185 bobines de pellicule gisaient depuis quarante-cinq ans dans un entrepôt. Présenté à Cannes hors compétition, le film "recomposé" est un puzzle ahurissant, où passe le visage magique de Romy Schneider, où Serge Reggiani exhibe "sa trogne de marron sculpté" et où Clouzot lui-même, égaré, dur, est englué dans une demi-folie provoquée par la mort de sa femme Vera. Ces bribes aux couleurs violentes, ces images démultipliées, ces plans inspirés de Calder, ces fantasmes morbides (muets, car la bande-son s'est évaporée), tout mène à la jalousie terrible, maladive, funèbre, d'un hôtelier, Marcel, pour son épouse, Odette. C'est comme un incendie qui ravage tout, la pellicule, les corps, les âmes. Clouzot règle ses comptes avec une morte. "Tout a commencé par une rencontre dans un ascenseur", explique Serge Bromberg, maître d'œuvre de cette reconstitution, passionné de vieux films, détective du 35 mm. Il y a deux ans, il passe deux heures coincé entre le 5e et le 6e étage avec une dame. Il raconte son métier, elle lui confie un souvenir. Bromberg écoute. C'est Inès Clouzot, la dernière épouse du cinéaste. Elle parle de "l'Enfer", film englouti, et précise que les bobines existent, mais sous séquestre. La compagnie d'assurance les a rangées dans un coin. Bien sûr, Claude Chabrol a repris le scénario de Clouzot en 1994, et en a tiré un film du même titre, avec François Cluzet et Emmanuelle Béart. "Mais Clouzot avait en tête une autre œuvre, en rupture totale avec le passé, où il réinventerait le cinéma", précise Bromberg. Fin 2007, la chasse commence. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - Emil Cioran
 
 
La scène se passe en Roumanie dans les années 1930 du XXe siècle, c'est-à-dire nulle part. Il y a là un fils de pope particulièrement brillant et agité : Cioran. Il souffre, il déteste son pays, il suffoque, il n'en peut plus, il rêve d'un grand chambardement révolutionnaire, il est mordu de métaphysique mais son corps le gêne, il désire de toutes ses forces un violent orage. Le voici : c'est Hitler. A partir de là, crise radicale : Cioran appelle son pays à une totale transfiguration. Il a 22 ans à Berlin, la fascination a lieu, il s'engage : "Celui qui, entre 20 et 30 ans, ne souscrit pas en fanatique, à la fureur et à la démesure, est un imbécile. On n'est libéral que par fatigue." Le ton est donné, et l'embêtant est que cet enragé très cultivé est plein de talent. Il a besoin de folie, dit-il, et d'une folie agissante. Il fait donc l'éloge de l'irrationnel et de l'insensé, il a envie de faire sauter les cimetières, il nie, en Oedipe furieux, le christianisme mou de son curé de père, il prend le parti de sa mère, pas croyante, mais qui fait semblant. On se frotte les yeux en lisant aujourd'hui les articles de Cioran dans "Vremea", journal roumain de l'époque : "Aucun homme politique dans le monde actuel ne m'inspire autant de sympathie et d'admiration que Hitler." La transposition locale s'appelle la Garde de Fer, sa brutalité, son antisémitisme rabique, ses assassinats crapuleux. Comment cet admirateur futur de Beckett, bourré de lectures théologiques et mystiques, a-t-il pu avaler la pire propagande fasciste (la terre, l'effort, la communauté de sang, etc.) ?
 

Emil Cioran est né en 1911 en Roumanie. À l'âge de 25 ans, il s'exile définitivement en France. Proche de Ionesco, Beckett. Mort à Paris en 1995.
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En 1940 encore, Cioran fait l'éloge du sinistre Codreanu, dit "le Capitaine" (qui vient d'être liquidé), en parlant de son héroïsme de "paysan écartelé dans l'absolu" et se laisse aller à cette énormité : "À l'exception de Jésus, aucun mort n'a été plus vivant parmi les vivants." On comprend que longtemps après sa fugue magistrale en France, ayant rompu avec ce passé délirant, il ait été surveillé par la grotesque police secrète communiste roumaine, la Securitate, avec des comptes rendus dignes du Père Ubu. Lire la suite...
 

 
Mai 2009 - Inde
 
 

En Inde, 33% des maires des grandes villes doivent être des femmes. Lire l'article...
 

4 000 femmes créèrent Sewabank en 1974 en investissant chacune 10 roupies !
 
 
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C'est le gratte-ciel le plus moderne d'Ahmedabad, siège de plusieurs grands établissements financiers. Sewabank, qui occupe un étage entier, n'est pourtant pas une banque comme les autres. En sari multicolore, en costume tribal ou couvertes de noir de la tête aux pieds comme de coutume chez les musulmanes du Gujerat, on ne trouve que des femmes dans le vaste hall plein d'animation. Ici, pas de guichets blindés, mais des employées à portée de main, qui répondent patiemment à toutes les questions et enregistrent de minuscules mouvements de fonds : un dépôt de 10 roupies (0,15 euro), un retrait de 150 (2,35 euros)... Une réceptionniste reçoit les illettrées et les aide à remplir les formulaires. Dans un coin, un photographe tire le portrait d'une femme sans âge qui tient devant elle un panneau à son nom. Illettrée, elle aussi, comme la majorité des clientes - qui sont aussi les actionnaires. La banque est gérée par des professionnels, mais elle appartient aux 100 000 femmes pauvres qui lui confient leurs économies. Elles ne gagnent parfois que 50 roupies par jour (0,80 euro), leur compte affiche en moyenne un solde de 2 400 roupies (37 euros). Mais chaque versement les rapproche du profil d'"épargnante régulière", qui donne droit à un prêt de 50 000 roupies maximum (800 euros). Bol d'air vital, ces microcrédits ont permis, depuis trente-cinq ans, à des milliers de femmes d'acheter des outils, des matières premières, de faire face à la maladie, aux accidents, de parer aux conséquences des catastrophes naturelles ou des émeutes - comme les pogroms antimusulmans de 2002. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - "L'Holocauste comme culture" par Imre Kertész
 
 
À 79 ans, Imre Kertész n'a rien perdu de son regard pétillant, ni de son humour Mitteleuropa. L'écrivain hongrois, lauréat du prix Nobel de littérature 2002, reçoit comme toujours dans les salons de l'hôtel Kempinski, sur le Ku'damm, les Champs- Élysées de Berlin. À deux pas de son domicile. Atteint de la maladie de Parkinson, il voyage de moins en moins. De tous les auteurs qui ont consacré leur œuvre à l'Holocauste, l'écrivain hongrois est certainement le plus paradoxal. Rescapé du camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau, ce fils d'une famille juive modeste de Budapest est l'auteur d'une œuvre prolifique ("Être sans destin", "Kaddish pour l'enfant qui ne naîtra pas", "le Refus", "Liquidation", etc.), où se chevauchent deux univers concentrationnaires. Contrairement à d'autres artistes, Imre Kertész n'a jamais cherché à fuir la Hongrie communiste, jugeant même qu'elle l'avait d'une certaine façon "sauvé" du traumatisme de l'Holocauste. En 2002, treize ans après la chute du Mur, il décide de s'installer à Berlin, "cette ville qui ne cache pas son passé". Il aime d'ailleurs la langue allemande (il a traduit Nietzsche, Hofmannsthal, Freud, Roth, Wittgenstein). Si Imre Kertész n'a pas publié à proprement parler de témoignage sur Auschwitz, il a recréé un univers où le romanesque et l'autobiographie se mêlent aux questions universelles de la survie et de l'exil, mais aussi de l'humain, du religieux et de l'éthique. Il n'est pas seulement un romancier, c'est aussi un théoricien de l'Holocauste et du totalitarisme en général. A travers ses essais, considérations et discours se dessine la biographie intellectuelle d'un très grand écrivain européen. Lire la suite…
 

Imre Kertész "79 ans, prix Nobel 2002". Né à Budapest le 9 novembre 1929, Imre Kertész est déporté à Auschwitz en 1944 à l'âge de 15 ans. Après la guerre, il devient journaliste.
 

 
Mai 2009 - Onze pieds ?
 
 

La Révolution de 1793
Pierre Michon, né le 28 mars 1945
Vue du Comité de Salut public
 
Nouvel Obs : Vous racontez l'histoire d'un tableau imaginaire, exécuté par un peintre imaginaire. Mais le tour de force est que ce tableau, en lisant votre livre, on le voit. Comme s'il existait, comme si on pouvait encore l'admirer au Louvre, dans la salle où vous dites qu'il est exposé.
Pierre Michon : La vérité, c'est que j'ai du mal à dire que le tableau est imaginaire. Parce que maintenant que je l'ai inventé, je me dis qu'il manquait à la Révolution. Quand j'ai pensé ce texte, je m'en souviens, c'était à Orléans, pendant l'hiver 1993, il était 6 heures du soir. J'étais en train de lire des choses sur Tiepolo. Je me suis dit : pourquoi un peintre de l'ancienne école, c'est-à-dire un Fragonard mais en plus puissant, n'aurait pas fait un tableau génial sur la Révolution, plutôt que de la laisser à David et aux néoclassiques, à l'esprit nouveau, à l'esprit républicain ? Et ce tableau, d'un type qui aurait travaillé même avec Tiepolo, je me suis demandé ce qu'il aurait pu représenter. Des hommes de pouvoir. J'ai pensé au Richelieu de Champaigne, à des tableaux d'hommes debout. Je me suis saisi aussitôt d'un livre où il y avait les noms des membres du Comité de Salut public, et je les ai notés dans l'ordre : Billaud, Carnot, Prieur, Prieur, Couthon, Robespierre, Collot, Barère, Lindet, Saint-Just, Saint-André. Ca faisait onze pieds. C'est cette scansion qui a fait le tableau. Lire l’article…
 

 
Mai 2009 - Ambedkar, le Ghandi des intouchables
 
 
Bardé de doctorats (droit, économie, sciences politiques) obtenus à l'Université Columbia et à la London School of Economics, Ambedkar était non seulement l'intouchable le plus diplômé, mais aussi le meilleur juriste de toute l'Inde. Après l'indépendance, Gandhi insistera pour qu'il soit nommé ministre de la Justice. Mais la relation entre les deux hommes est houleuse. Gandhi se veut le sauveur des intouchables, qu'il rebaptise harijans, "enfants de Dieu", égaux en dignité aux brahmanes. Mais, pour l'hindouiste qu'il est, chacun doit obéir à son karma, rester dans sa caste et exercer le métier auquel il, est destiné par son hérédité. Ambedkar dénonce ces archaïsmes. Pour lui, les droits civiques des intouchables doivent être défendus par l'État. Quant à l'hindouisme, il doit disparaître, affirme-t-il, si l'Inde veut vraiment respecter les valeurs de justice et d'égalité. Ambedkar fonde les premiers journaux, les premières écoles, le premier parti dalit. Décidé à "ne pas mourir hindouiste", il hésite : se convertir au sikhisme, au christianisme, à l'islam ? Malgré leur universalisme, ces religions se sont laissé contaminer par les distinctions de caste. Il optera donc pour la seule doctrine qui ait combattu le brahmanisme et le castéisme : celle du Bouddha. Mais c'est un bouddhisme qu'il débarrasse de toute "superstition", toute "hiérarchie", voire tout rituel, pour en faire une doctrine de la libération de soi et du monde.
 

Bardé de doctorats (droit, économie, sciences politiques)
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Retour aux sources : l'Inde ne fut-elle pas le berceau du bouddhisme ? Quant aux intouchables - une catégorie qui ne surgit que vers le début de notre ère -, ils ne seraient, selon lui, que des bouddhistes punis de père en fils pour avoir résisté à la restauration du brahmanisme. (Source)
 

 
Mai 2009 - Baron Haussmann
 
 

Napoléon 1er a dit : "Pour embellir Paris, il y a plus à démolir qu'à bâtir." Napoléon III l'a fait avec l'aide du baron Haussmann.
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Napoléon 1er l'a dit : "Pour embellir Paris, il y a plus à démolir qu'à bâtir." Napoléon III l'a fait, avec l'aide du baron Haussmann.
Né en 1809, ce colosse de presque deux mètres fait ses armes de bureaucrate dans le Var, l'Yonne, puis en Gironde, avant que la consécration ne lui échoie en juin 1853 avec sa nomination à Paris : "La foudre tombant dans mon assiette au dîner du sous-préfet de Bazas ne m'eût pas plus surpris que ma nomination à la préfecture de la Seine." Surprise feinte, mais qu'importe. Il restera préfet jusqu'en 1870, entouré d'une armée de fonctionnaires dévoués, comme les fidèles Alphand (Parcs et Jardins) et Belgrand (Eaux et Égouts), expropriant, creusant, nivelant sans relâche, donnant à la ville le visage qu'on lui connaît aujourd'hui.
Cet essai balaie quelques idées reçues : sans le nier, l'auteur minimise le rôle du baron, organisateur hors pair et soutien indéfectible de l'empereur, mais qui ne fut somme toute qu'un remarquable exécutant, dans la droite ligne de ce qu'avait imaginé la Commission des embellissements de Paris. Avec toutefois une raideur et une manie de la perspective qui laisse peu de chance à ce qui se trouve sur sa route : ainsi de la tour Bichat, vestige d'une commanderie templière que Mérimée tenta de sauver, et qui fut sacrifiée au percement de la rue Monge. Paris éventré, Paris arasé, mais Paris haussmannisé... et vidé de ceux qui le bâtissaient : les ouvriers.
 
 
Certains ont beau pleurer le Paris de Villon, et Zola décrire dans "la Curée" "Paris haché à coups de sabre, les veines ouvertes", rien ne résiste à la poussée haussmannienne. La déchéance de l'Empire et le retour à la République ne mettront pas fin aux grands travaux, Alphand poursuivant l'œuvre entreprise par celui qu'on surnomma aimablement "le préfet éventreur" et "l'Attila de l'expropriation". (Source)
 

 
Mai 2009 - Wall Street
 
 
Wall Street statesman. L'expression est tellement prétentieuse qu'on ose à peine traduire : homme d'État de Wall Street ? Banquier de Wall Street à la stature d'homme d'État ? C'est en tout cas le titre que réserve le petit monde de la finance à ses stars, à ses grands capitaines installés au sommet des gratte-ciel new-yorkais. À en croire sa biographe, le PDG de JP Morgan, Jamie Dimon, serait un authentique Wall Street statesman, à la sagesse digne d'un président. Jamie Dimon n'aime pas que l'on critique ses pairs : "Quand j'entends sans arrêt dire du mal de l'Amérique des affaires, personnellement je ne comprends pas. Cela fait du tort à notre pays." Il déteste aussi que le gouvernement vienne mettre le nez dans ses comptes. Avec le patron de la puissante banque Goldman Sachs et quelques autres financiers, il exige de rembourser rapidement les prêts que l'État leur a accordés cet automne, lorsque Wall Street paniquait. Il veut reprendre sa liberté de banquier. Mais Jamie Dimon devra peut-être patienter. Alors que l'administration américaine publie le résultat des stress tests, les "tests de résistance" imposés aux 19 plus grandes banques, les relations entre la Maison-Blanche et les gnomes de Wall Street prennent de plus en plus l'allure d'un fascinant bras de fer entre titans. Le ton reste poli, parfois cordial. Valerie Jarrett, amie et proche conseillère d'Obama, est en contact permanent avec les patrons de banque ; Tim Geithner, le secrétaire au Trésor, les connaît tous personnellement pour avoir été président de la Fed de New York.
 

Les banquiers américains n'ont rien appris ! Ils n'ont qu'une idée en tête : se débarrasser de la tutelle de l'état.
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Et si Barack Obama a refusé le choc frontal qu'aurait été la nationalisation des banques les plus fragiles, c'est lui qui leur a imposé ces tests de résistance basés sur des scénarios trop pessimistes à leur goût. Un revirement ? Plutôt un agacement. "Je n'ai pas le pouvoir d'appuyer sur un bouton et de voir tout à coup les banquiers faire exactement ce que je veux", confiait récemment le président. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - Vadin Repin
 
 

1971 - Naissance à Novossibirsk.
1981 - 1er concert à Moscou.
1989 - 1er prix au concours Reine-Elisabeth.
2009 - Disque Brahms (Deutsche Grammophon)
et concert Prokofiev le 19 mai Salle Pleyel.
 
Il est sibérien. Natif de Novossibirsk, chef-lieu de cette partie asiatique de la Russie. Il est venu pour la première fois à Moscou en 1981, quand la ville était encore très pauvre, très sale, les boutiques vides, les queues interminables, les matrones fagotées à faire peur. Un cloaque de province, malgré la pompe des gratte-ciel staliniens et le faste inouï des stations de métro. Depuis, c'est devenu une mégapole ultramoderne, où l'argent coule à flots, où les Mercedes foncent à cent à l'heure sur les boulevards, où les filles sont encore plus jolies que leurs manteaux de fourrure. "En vingt-cinq ans, deux siècles ont passé." Mais ce qu'il y a de merveilleux en Russie, c'est la permanence et la force de la tradition musicale. Rostropovitch au violoncelle, Oïstrakh au violon, Richter au piano, ces purs produits de l'époque soviétique ont trouvé de dignes successeurs dans la nouvelle démocratie : Lugansky au piano, Kniazev au violon celle, Repin surtout, le roi du violon. Et le public lui non plus n'a pas changé, n'a pas faibli. Dans cette immense Salle Tchaïkovski en forme d'ovale incliné, il écoute, recueilli, médusé, son idole jouer le Concerto de Sibelius, avec l'orchestre de Novossibirsk. "Comment refuser mon concours à l'orchestre de ma ville natale ?" Beaucoup de violonistes jouent les yeux fermés. Lui, Repin, ne se concentre pas de cette manière, il garde les yeux ouverts, il a besoin de voir le public, de rester en contact avec la salle, et c'est pourquoi sans doute son jeu a quelque chose de direct, de frémissant, qui subjugue immédiatement. La musique n'est pas, pour lui, un monde fermé, à part, qui demanderait une préparation initiatique ; il ouvre la musique aux auditeurs, il les invite à entrer. Lire la suite...
 

 
Mai 2009 - Montaigne
 
 
Attention, travaux. On traduit Montaigne en français moderne. Dans le même temps, on publie deux chapitres des Essais traduits en français du... japonais. La langue de Montaigne est en réfection, en réanimation, aux urgences. C'est une "langue presque morte", diagnostique, avec le ton de Dr House, Michel Onfray dans sa préface à la traduction du japonais par Pascal Hervieu. À quoi bon rajeunir Montaigne ? me dites-vous. Ses immortelles leçons sur l'art d'apprendre à vieillir, pourquoi ne pas les appliquer d'abord à sa prose ? Pas du tout. Cette langue a quatre siècles, la goutte, la gravelle. Cette senior ne correspond plus aux exigences du marché. Cachez cette poudreuse gasconnade que l'époque ne saurait voir. Pour renaître, Montaigne doit se faire hara-kiri ou recourir au Botox. Énième remake de la querelle des Anciens et des Modernes, des cuistres et des cool, des nomades et des enracinés ? Si ce n'était que cela. "La forme compte moins que le fond", écrit Onfray pour justifier cette nouvelle adaptation. Monsieur Homais, parmi ses bocaux, n'eût pas mieux dit : pour le fond, tapez un ; tapez deux pour la forme... Dans ces conditions, plus rien ne s'oppose à la traduction en prose des "Fleurs du mal" : régularisons ces rimes qui ne riment à rien, ces alexandrins qui ne s'adressent pas toujours au "plus grand nombre", comme dit Onfray. Trêve de style, de musique, de jazz. Ici, le "parler décousu, déréglé et hardi" de Montaigne est sommé de travailler plus, de signifier plus. Grâce au "détour par le Japon", la compréhension des Essais est "dispensée de ralentissement", assure Onfray, homme pressé du toyotisme. Rien ne doit plus entraver la productivité sémantique. Circulez. "Cette traduction est une entreprise expérimentale, assez considérable dans l'énormité, et dont le succès semble douteux", déplore le critique Jean Starobinski, qui s'apprête à publier un ouvrage sur Diderot, lecteur de Montaigne ("Un diable de ramage"). Le penseur cavalier jugeait son style "trop épais en figures" (en images). Ses adaptateurs le défigurent secourablement. C'est Montaigne sans Montaigne. Liquidation des métaphores chasseresses : le XVIe siècle n'a pas eu lieu. Là où l'auteur parle de "police féminine", Hervieu traduit " éducation des jeunes filles" et André Lanly "gouvernement des femmes". C'est abuser du fer à lisser.Lire la suite...
 
Michel de Montaigne (1533-1592)
est né au château de Montaigne en Dordogne.


«Il n'est plus temps de regimber quand on s'est laissé entraver Cette belle reigle que je voy passer de main en main entre elles, comme un sainct oracle, «Sers ton mary comme ton maistre et t'en guarde comme d'un traître» est pareillement injurieuse et difficile. Je suis trop mol pour dessins si épineux.» Montaigne
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«Il n'est plus temps de regimber quand on s'est laissé entraver. Et la belle règle que je vois passer de main en main parmi les épouses, comme un saint oracle : «Sers-ton mari comme un maître et garde-t'en comme d'un traître» est pareillement injuste et pénible. Je suis trop doux pour des dessins aussi pleins d'épines.» Traduit en français moderne (André Lanly)
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Mai 2009 - Hôpital : diagnostic de 140 professeurs
 
 
 
Une fois n'est pas coutume, le mouvement est parti d'en haut, des "bac+25", ces professeurs de médecine parvenus au faîte de leur spécialité, plus familiers des blocs opératoires et des congrès scientifiques que des défilés protestataires. "Il fallait bien qu'on finisse par se faire entendre. Nous avons un métier et une conscience, tout de même", rigole Olivier Lyon-Caen, neurologue à la Pitié-Salpêtrière. Avec son confrère André Grimaldi, diabétologue, ils ont battu le rappel de leurs pairs. Une flopée d'e-mails plus tard, "l'appel des 25" contre la loi Bachelot et "l'hôpital entreprise" était lancé dans le Nouvel Observateur. Ces vingt-cinq-là, à une exception près, n'exercent pas de manière privée à l'hôpital. Ainsi, contrairement à ce qu'ont laissé entendre le gouvernement et le secrétaire général de la CFDT François Chérèque, ils ne sauraient être suspectés de défendre leurs dépassements d'honoraires ! Ils furent donc bien vite rejoints par 20 00 signataires sur le site du Nouvel Obs. Puis par des milliers de manifestants le 28 avril dernier, sur le macadam parisien. "Je n'étais jamais sorti manifester dans la rue pour mon métier... Mais l'hôpital ne peut pas seulement être soumis à une logique comptable. Je ne comprends pas la logique de cette réforme à contresens de l'histoire.
 
 
Obama est en train de réformer le système américain en s'inspirant de notre modèle, et nous, on fait le contraire en essayant de l'américaniser alors qu'on a vu la catastrophe que cela donnait aux États-Unis", lance Xavier Mariette, chef du service de rhumatologie du Kremlin-Bicêtre et signataire de "l'appel des 25", rencontré ce jour-là au milieu des infirmiers et infirmières qui ont rejoint le cortège. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - Picasso à Aix
 
 
Picasso et Cézanne ? Ils ne se sont jamais rencontrés. Ils n'ont échangé aucune correspondance. Le second n'a jamais fait la moindre allusion au premier. Et pourtant ! Entre les deux géants de la peinture française, il y a une incontestable filiation, une histoire commune, une inspiration partagée. Et il n'y a qu'Aix qui pouvait s'attacher à cerner les liens subtils qui unirent les deux artistes. Aix, qui se souvient encore de Picasso à la brasserie Les Deux Garçons, au festival lyrique et dans son château de Vauvenargues, où le peintre espagnol résida de 1959 à 1961 et devant l'entrée duquel il repose aujourd'hui. Aix, patrie de Cézanne, qui, après l'exposition de 2006, s'attache à valoriser une œuvre trop longtemps incomprise. Aix qui veut-par un dialogue inédit entre les œuvres des deux peintres-démontrer l'influence considérable de Cézanne sur Picasso. C'est au musée Granet, du 25 mai au 27 septembre, qu'aura lieu la "rencontre". "Pour Picasso, il y avait quelque chose d'impénétrable chez le maître d'Aix-en-Provence qui fait qu'il n'a jamais voulu refaire du Cézanne, réinterpréter une œuvre, comme il le fit d'autres maîtres." Bruno Ely est conservateur en chef, directeur du musée Granet et commissaire de l'exposition "Picasso/Cézanne" . "Nous n'exposerons pas d'œuvres en parallèle, comme ce fut le cas à Paris avec Picasso et les maîtres, mais montrerons comment Cézanne fut plutôt un point de départ pour Picasso." L'exposition aixoise s'attachera aussi à montrer un Picasso peu connu, un Picasso intime, méditant solitaire sur la peinture dans le secret de son atelier. Lire la suite...
 

Cinquante ans après l’installation de Picasso au château de Vauvenargues, grande exposition Picasso-Cézanne du 25 mai au 27 septembre 2009
 

 
Mai 2009 - Le cerveau
 
 
Il y a un âge pour toute chose, un âge pour marcher, un âge pour parler, un âge pour la musique, pour la lecture... Mais on continue à apprendre tout au long de la vie, disent les neurobiologistes. En fonction des lectures, des rencontres, des expériences vécues, de nouvelles connexions se font et se défont en permanence dans notre cerveau. Siège "du vrai, du beau, du bien", il est l'objet le plus complexe du monde vivant, note Jean-Pierre Changeux, directeur du laboratoire de neurobiologie moléculaire à l'Institut Pasteur. Sous ce titre inspiré de Platon, il propose d'ailleurs une "nouvelle approche neuronale" pour comprendre un peu mieux ce qui se trame sous notre capot. Car oui, il y a du neuf sur le cerveau !
Le célèbre professeur du Collège de France a rassemblé dans un livre la matière (grise) de ses trente années d'enseignement. On apprend ainsi que l'art, les comportements sociaux, l'éthique, la conscience de la mort sont ancrés dans notre cortex cérébral, le plus important du règne animal. Car l'évolution a doté nos ancêtres d'un sacré organe plissé entre les oreilles. Gros par rapport à notre taille et différemment compartimenté que chez les autres primates, il a développé des aires spécialisés dans des fonctions cognitives comme le raisonnement, le langage, la reconnaissance des lettres, la capacité de s'organiser suivant sa volonté dans un environnement changeant ou de tirer des plans sur la comète.
 

Quelque 100 milliards de neurones établissent chacun jusqu'à 60 000 contacts contribuant à donner un sens à nos vies…
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"Tout ce que nous faisons ou pensons est marqué dans notre cerveau", insiste Jean-Pierre Changeux, fasciné par les progrès réalisés dans l'exploration in vivo de nos cervelles. Au total, nous disposons de quelque 100 milliards de neurones qui, en établissant chacun jusqu'à 60 000 contacts, propagent des signaux électriques dans tous les sens et contribuent à donner un sens à nos vies. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - Maya Angelou
 
 

Danseuse, chanteuse, actrice, poétesse et mémorialiste…
Maya Angelou (Marguerite Johnson) née le 4 avril 1928
à Saint Louis (Missouri) révélée en 1969.
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Raviné par les années, le beau visage est toujours aussi fier. Le regard vous perce, la taille vous en impose - même quand Maya Angelou vous salue depuis son fauteuil, dans sa luxuriante demeure de Harlem. A 81 ans, la diva de la littérature américaine n'a rien perdu de son charme un peu roublard. Fille de parents fantasques, elle est flanquée dans un train, à l'âge de 3 ans, en compagnie de son petit frère, direction Stamps, un bled de l'Arkansas. Elle passe sa petite enfance dans cette ville qui en compte deux - une blanche et une noire -, élevée par une grand-mère d'une bonté infinie, avant d'être récupérée par sa mère à Chicago. Violée par le compagnon de celle-ci, elle devient muette et retourne à Stamps, où elle restera jusqu'à l'adolescence. Elle finit par retrouver la parole et découvre la poésie, avant de rejoindre à nouveau sa mère à San Francisco. Certaines vies sont bien remplies. Celle de Marguerite Johnson - son nom à l'état civil - déborde : contrôleuse de streetcar, cuisinière, chauffeur, proxénète et prostituée (dans cet ordre), danseuse, chanteuse (on trouve encore son disque de calypso de 1957 : "Miss Calypso"), metteur en scène, leader de la lutte pour les droits civiques, journaliste en Afrique pour "The Arab Observer", et bien sûr écrivaine... Elle a travaillé pour Martin Luther King, fut l'amie de Malcolm X, a été la compagne de Vusumzi Make, une figure de la lutte anti-apartheid, et a compté parmi ses proches James Baldwin, Alvin Ailey, Martha Graham et tant d'autres...
 
 
Poétesse avant tout, elle est peu connue en France, mais aux États-Unis, c'est une star. Ses livres, qui se vendent à des millions d'exemplaires, sont au programme de toutes les écoles. Enfin republié en France, "Je sais pourquoi chante l'oiseau en cage", le premier volume d'une autobiographie qui en compte six, a franchi le cap des 2 millions d'exemplaires en 1993, l'année où Maya Angelou fut choisie par Bill Clinton pour lire un poème lors de sa prestation de serment. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - Les Primitifs italiens
 
 
On les a longtemps négligés, voire carrément oubliés. "Les", ce sont les Primitifs italiens qui furent retirés des églises des XIIIe, XIVe et même XVe siècles pour être remplacés par des peintres plus modernes. Ces "fonds d’or", s’ils ont échappé de justesse - et grâce à la vigilance des hommes d’église -, à la destruction, ont été disséminés dans diverses collections. Et notamment dans celle d’Altenbourg, en Allemagne, considérée comme l’une des plus importantes collections de Primitifs italiens hors la Péninsule. Constituée au XIXe siècle par le baron Von Lindenau, elle compte 180 tableaux. Une quarantaine de ces œuvres sont exposées à Paris, au Musée Jacquemart-André, auxquelles s’ajoutent d’autres pièces prêtées notamment par la Pinacothèque du Vatican. L’occasion de redécouvrir cette période entre la fin du Gothique et le début de la Renaissance à travers deux courants essentiels, le Siennois et le Florentin. Vous avez dit "Primitifs" ? Ils ont l’air extrêmement fragile. Les panneaux de bois, souvent de taille modeste, sur lesquels les peintres ont décliné les grands moments de la Chrétienté, semblent même prêts à s’effriter. Et devant tous ces visages de madone ou de saints, ces Christ expiant et autres scènes de dévotion, on est ébloui par l’état de conservation de ces œuvres datant des XIIIe et XIVe siècles ainsi que par l’éclat des couleurs, d’une vivacité pour le coup miraculeuse. "Exceptionnelle", dira Nicolas Sainte Fare Garnot, le commissaire de l’exposition. La visite commence par l’école Siennoise... Lire la suite…
 
Au musée Jacquemart-André jusqu’au 21 juin 2009
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Mai 2009 - Afrique du sud
 
 

Des croix en souvenir des 2500 fermiers afrikaners tués dans la province de Limpopo.
 
Pour cette terre qu'il aime tant, et pour en conjurer ses démons au sommeil si fragile, Desmond Tutu avait inventé le beau rêve de "nation arc-en-ciel". Bien avant Obama, le futur prix Nobel de la paix semblait incarner une envie unanime de dépasser la "question raciale" dont Nelson Mandela avait habilement suspendu l'explosion. Le rêve a vécu. Malgré sa victoire annoncée aux élections générales du 22 avril, l'ANC va mal et, quand il s'exprime aujourd'hui, le vieil archevêque anglican met en rogne l'équipe dirigeante dont le bilan lui semble bien éloigné des promesses initiales. Les plus modérés lui pardonnent au nom de son grand âge. Plus crûment, d'autres lui reprochent de "penser comme et avec les Blancs"... Quinze ans après la fin officielle de l'apartheid, celui-ci règne toujours dans les têtes de la plupart des 50 millions de Sud-Africains. Et comme rien n'est simple dans un pays doté de 11 langues officielles, l'expression du malaise prend quelquefois des chemins inattendus. Fin mars, au détour d'une discussion nocturne animée sur les élections, Peter lâche tout à trac qu'"une partie des problèmes vient du fait qu'il y a encore beaucoup trop de Blancs dans ce pays". Deux Blanches sursautent dans la courette de la maison située à Troyeville, un secteur central de Johannesburg où les Blancs n'ont guère l'habitude de poser leurs valises. L'une est la petite amie de l'imprécateur, l'autre a épousé son meilleur ami, pas moins virulent dans sa comptabilité accusatrice.
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Mai 2009 - Éloge de la folie, le cas Wolfson
 
 
C'est l'histoire d'un vrai livre. D'un de ces livres qui vous secouent et vous laisseront vibrants jusqu'à la fin de vos jours. Et qui méritait bien ce "dossier", que son éditeur J.-B. Pontalis introduit avec sa claire et sûre intelligence.
Le manuscrit est arrivé par la poste chez Gallimard en 1963. Titre : "Le Schizo et les Langues". Auteur : Louis Wolfson, schizophrène new-yorkais, mais le livre est en français. Queneau juge le manuscrit d'"un intérêt exceptionnel". Pontalis raconte que certains passages ont fait beaucoup rire le père de Zazie - étonnant. Paulhan, lui, fait la grimace : il faut "revoir tout ce manuscrit" (il rappelle en cela son prédécesseur Jacques Rivière demandant à Artaud de récrire ses textes). De quoi s'agit-il ? D'un psychotique qui hait sa langue maternelle, au sens propre : celle de sa mère ; qui étudie plusieurs langues étrangères, dont le français ; qui met au point un système linguistique à la fois simple et complexe consistant à substituer aux mots de la langue honnie des mots étrangers de graphie et de sens approchants. Ainsi, quand sa mère glapit, exprès, qu'elle a perdu ses lunettes, le mot where est particulièrement douloureux ("ses cris me déchiraient la fibre", dit l'ivrogne assassin de Baudelaire). Wolfson cherche un équivalent, et à la suite d'un de ses vertigineux exposés où voisinent la parfaite rigueur et le délire complet, il trouve l'allemand woher, "d'où". Quand il entend where, il pense woher, et ne souffre pas. Lire la suite…
 

Louis Wolfson en 1984. Un psychotique qui hait sa langue maternelle, l’anglais.
 

 
Mai 2009 - La Divine Comédie
 
 

Dante Alighieri / La divine comédie est une somme des conceptions politiques, scientifiques et philosophiques de ce moment : 1300.
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Commençons par enlever l'épithète "divine" rajoutée au XVIe siècle (et de nos jours, il n'y a de "divine" que Facteur/actrice fétiche de John Waters). Donc, l'œuvre de Dante portait initialement et simplement le nom de Commedia. On ne compte plus en France, les traductions de Dante - ou plutôt si, la Comédie a été traduite, intégralement ou en partie, trente-huit fois, depuis 1921 ! Même le philosophe pop-marxiste Mehdi Belhaj Kacem s'y est mesuré, non sans succès, l'année dernière avec la Mita Nova. Les éditions de La Différence vivent par et pour la littérature. Leur saint patron, Joaquim Vital, que l'on dirait tout droit sorti du Cinquième Empire de Dominique de Roux, a décidé de publier une édition revue et corrigée de la (Divine) Comédie par Didier Marc Garin. Un vrai bonheur. L'œuvre raconte le voyage imaginaire du narrateur qui se retrouve brusquement plongé dans une forêt sombre. Là, il rencontre Virgile qui l'invite à pénétrer dans le monde de l'au-delà. Dante le suit. La visite de l'enfer ouvre son périple, suivi du purgatoire et, enfin, du paradis. Le récit, rédigé à la première personne, est un véritable voyage initiatique. Sur son parcours, Dante rencontre une centaine de personnalités, depuis les grandes figures mythiques de l'Antiquité comme les philosophes, jusqu'aux personnalités locales contemporaines de l'auteur, chacune d'elles étant la personnification d'une faute ou d'une vertu religieuse ou politique.
 
 
Cette œuvre monumentale offre ainsi de nombreuses lectures différentes. Elle est à la fois le récit du parcours personnel de Dante, des considérations sur les politiques de quartier de l'ingrate Florence, un manuel théologique chrétien de description de l'au- delà, un roman à valeur éthique et morale et une réflexion sur la recherche du salut éternel. Lire la suite...
 

 
Mai 2009 - Haïti
 
 
Haïti, septembre 2008. Après le passage de trois cyclones, la ville de Gonaïve est submergée par des coulées de boue ; 468 personnes trouvent la mort dans la catastrophe. Frédéric Boisset et Pierre Creisson filment, pour Arte, l'ampleur du drame et le désarroi des survivants. Six mois plus tard, ils sont de retour dans l'île. Le constat qu'ils dressent est terrifiant. A Gonaïve, la boue s'est transformée en terre. Dans les maisons, dans les rues, elle est encore partout. Il reste 2 millions de mètres cubes à déblayer. Il faut faire vite et dégager les égouts avant la saison des pluies. Des ONG, comme Action contre la Faim, s'y emploient en payant les habitants pour qu'ils dégagent la cité de la gangue de terre qui l'étouffe. C'est l'opération Cash for Work. Tout le monde y trouve son compte : les travaux avancent et les gens gagnent de l'argent pour survivre. Hélas, faute de financement, Action contre la Faim doit arrêter le programme. Résultat, après avoir été payés pour déblayer et nettoyer, les habitants de Gonaïve cessent le travail en attendant qu'une autre ONG les rétribue pour ce dont ils sont, de toute façon, les premiers bénéficiaires... Il y a seulement quelques décennies, Haïti était couverte d'arbres et de forêts qui retenaient les pluies. Pour survivre, la population a vendu les essences les plus riches et transformé le reste en charbon de bois... Aujourd'hui, des programmes sont en cours pour ériger des paliers sur les pentes des montagnes afin de stopper l'érosion.
 

Les Haïtiens utilisent la terre pour calmer leur faim… Ils fabriquent des galettes avec de l'argile, un peu de sucre et de l'eau !
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Mais, pendant que des hommes et des femmes s'emploient à ces travaux, d'autres, en contrebas, creusent les parois pour vendre des pierres. D'un côté, la montagne se comble, de l'autre elle se vide... Malgré une aide internationale réelle mais insuffisante - 1 million de dollars par an -, les Haïtiens n'ont toujours d'autres ressources que celle de piller leur propre terre. Cette terre qu'ils utilisent aussi pour calmer leur faim. En mêlant de l'argile à un peu de sucre et d'eau, ils fabriquent des galettes qu'ils vendent sur les marchés. Dans les pays occidentaux, les images de ces enfants croquant ces galettes de terre ont choqué et donné une image du pays tellement désastreuse que désormais leur vente se fait à la sauvette... (Source)
 

 
Mai 2009 - Berlin 1945
 
 
 
"Les filles des ruines" sur France 2 en mai
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Pendant la Seconde Guerre mondiale, des femmes violentées au cours de la bataille de Berlin ont raconté leur traumatisme dans des récits écrits personnels.
Au printemps 1945, trois Berlinoises racontent dans leurs journaux intimes la bataille de Berlin du point de vue de la population civile. Au cœur de la guerre, elles écrivent en toutes circonstances. Même quand elles sont exposées aux viols en série perpétrés par les forces conquérantes. L'assaut sur le corps des femmes est le plus petit dénominateur commun de tous les conflits barbares, qu'un tabou persistant maintient dans le silence. "Les Filles des ruines" confrontent ces récits. Lire l’article page 3
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"Quand l’honneur est perdu, tout est perdu" dit un homme à sa fille violée douze fois en lui tendant une corde. Docile, elle va se pendre comme le feront 10000 femmes de la ville.
Les femmes et la bataille de Berlin… Peur, famine, viols, le destin des Berlinoises au printemps 1945. "Entre 100 000 et 300 000 viols !"

 
Mai 2009 - Proposition de loi "Welcome"
 
 

De ; Welcome à : la Journée de la Jupe, des fictions font réagir la société. / Charte des droits fondamentaux de l’U.E. "Toute personne a droit à son intégrité physique et mentale"… même en situation irrégulière !
 
Le 30 avril, à l'Assemblée nationale, les députés examineront la "proposition de loi Welcome" - allusion au film de Philippe Lioret - qui vise à supprimer le "délit de solidarité" dont se rend coupable toute personne venant en aide à un étranger en situation irrégulière. Parallèlement, alors que le discours antisémite du président iranien Ahmadinejad a fait exploser la conférence Durban II sur le racisme, Alain Finkielkraut oppose à l'esprit de Durban l'esprit de "la Journée de la Jupe", film de Jean-Paul Lilienfeld que le philosophe qualifie d'"événement politique d'une importance extrême" et même d'"événement historique". Deux films récents qui remportent tous deux un succès populaire, moins du fait de leurs qualités esthétiques que parce qu'ils touchent au cœur des débats qui agitent la société d'aujourd'hui : on est loin d'une certaine qualité française caractérisée par "la psychologie dans un monde intemporel, [les] films de genre aux scénaristes orfèvres en répliques et [les] vedettes". Certes, ces deux films sont portés par des acteurs vedettes, Vincent Lindon et Isabelle Adjani. Mais aussi bien pour Lindon dans "Welcome" que pour Adjani dans "la Journée de la Jupe", le talent des interprètes se met au service d'un propos polémique. On est aux antipodes du traditionnel nombrilisme hexagonal. Et dans un cas comme dans l'autre, le film sort du cadre artistique pour interpeller le spectateur, le sommer de prendre position. Ce qu'il fait, d'ailleurs : en témoignent des dizaines de débats publics dans toute la France et des milliers de points de vue exprimés sur internet ou dans les médias classiques. En attendant de changer la loi... Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - Art stalinien
 
 
Spécialiste du Moyen Age, l'archéologue François Gentili procède jusqu'à la fin avril à l'exhumation, morceau par morceau, d'un monument brisé datant de 1937 et typique de... l'art réaliste soviétique du plus pur style stalinien. Flashback : en 2004, l'Inrap (Institut national de Recherches archéologiques préventives) effectuait une fouille de routine sur le site du château de Baillet-en-France (Val-d'Oise) pour en examiner les vestiges médiévaux. C'est alors que, explorant une ancienne glacière, François Gentili eut la surprise de sa vie : il découvrit une masse de gravats, fragments de sculptures entremêlés parmi lesquels le faisceau de sa lampe torche illumina soudain le fameux motif soviétique de la faucille et du marteau. Stupéfaction... Mais, comme disent les scientifiques, "le hasard ne favorise que les esprits préparés". Le spécialiste se souvenait, enfant, avoir compulsé une collection de la revue "l'Illustration", et notamment un reportage sur l'Exposition universelle de 1937, à Paris. "Je me suis précipité chez mes parents pour retrouver ce numéro", dit François Gentili. La revue y était tou jours, et l'archéologue médiéviste put aussitôt identifier "ses" fragments : des vestiges du pavillon de l'Union soviétique. Que faisaient-ils à Baillet-en-France ? L'histoire a pu être facilement reconstituée car on se souvint que, après la clôture de l'Exposition, les sculptures avaient été offertes par l'URSS à un syndicat ami, la CGT. Laquelle était alors propriétaire du domaine de Baillet, l'un de ses centres de vacances. Le syndicat exposa dans le parc les sculptures... Lire la suite…
 

Des sculptures révolutionnaires dans un château du XVIIe...
Aujourd'hui, ils appartiennent avec le domaine, à la mairie de Baillet !
 

 
Mai 2009 - Les cocus...
 
 

Les Grecs, les Romains, les juifs anciens lapidaient ou tuaient les amants illégaux. Après le concile de Latran en 1139, l'église fait du mariage un sacrement indissoluble !
 
Un jour d'avril 1845, à l'aube, Victor Hugo qui vient d'être élu à la pairie est surpris en flagrant délit avec Mme Biart, mariée à un peintre. Hugo, protégé par son statut, est libéré tandis que la jeune femme est incarcérée à Saint-Lazare avec les prostituées et les délinquantes. L'affaire ne gêne en rien la carrière du poète. La suite est plus surprenante encore: partageant sa vie entre deux femmes depuis plusieurs années, Juliette Drouet, sa maîtresse, et Adèle, son épouse, Hugo avoue toute l'histoire dès le lendemain à cette dernière. Adèle, qui n'est pas elle-même un modèle de vertu, rend visite à la prisonnière, obtient son transfert dans un couvent et la reçoit quelques mois plus tard dans son salon tandis que M. Biart, le cocu, est conspué pour mesquinerie par l'opinion publique. Paradoxe français, diraient les Anglo-Saxons. Lamartine commente: «La France est élastique: on se relève même d'un canapé.»
Les Grecs, les Romains, les juifs anciens lapidaient ou tuaient les amants illégaux. Après le concile de Latran en 1139, l'Eglise fait du mariage un sacrement indissoluble: l'adultère devient manquement à la réciprocité conjugale. Il met à mal la certitude de la filiation, mélange bâtards et enfants légitimes, fait tomber l'opprobre sur les familles. A partir d'un dépouillement minutieux des archives de tribunaux, Agnès Walch dresse une longue chronique de l'infidélité et de sa répression à partir du XVIe siècle. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - Essais nucléaires...
 
 


Mururoa "l'île du secret" comme l'appellent les Polynésiens.

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C'est le général de Gaulle qui lance la France dans la course atomique… 210 essais nucléaires, d'abord au Sahara dès 1960, puis à partir de 1966, en Polynésie. Abandonnés en 1996.
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Au Sahara et en Polynésie, des centaines de civils et de militaires ont été contaminés par des expérimentations atomiques. Exposés parfois sans précaution aux radiations, les «cobayes» de la bombe ont enfin obtenu un début de reconnaissance. Sophie des Déserts raconte leur long combat contre le secret-défense et la raison d'État.
"Là-bas, à Mururoa, on m'a jeté un sort", disait-il. Depuis son séjour dans l'atoll en 1976-1977, Yannik Floc'h n'était plus que l'ombre de lui-même. "L'île du secret", comme l'appellent les Polynésiens, avait emporté sa jeunesse. A 20 ans déjà ses dents cassaient, ses poumons toussaient, sa colonne vertébrale ployait sous la douleur. Marie-Josée, son épouse, le voyait se dégrader, sous l'œil impuissant des médecins. L'ancien matelot revenait toujours sur sa mission à "Muru", les baignages dans le lagon, ces journées à ramasser de la ferraille en zone contaminée, il était persuadé que les racines de son mal se trouvaient là. Yannik luttait, jusqu'à ce qu'un jour son corps ne puisse plus bouger. On lui découvrit alors un cancer du poumon qui avait essaimé tout le long de sa colonne vertébrale. "Un sort", répétait-il, sans illusion mais sans hargne. Yannik avait passé en Polynésie les plus belles années de sa vie. Avant de lui dire adieu, en juillet 2004, son épouse a promis : "Je ferai éclore la vérité."
Ce samedi de mars 2009, Marie-Josée Floc'h déjeune sur une vedette de la Vilaine affrétée par l'Aven (Association des Vétérans des Essais nucléaires). Autour d'elle, des messieurs plus tout jeunes, souvent malades, et pourtant un vent léger, comme un souffle d'espoir, traverse l'assemblée. Après presque un demi-siècle de silence, l'État français ouvre le dossier de ses essais nucléaires. "Il est temps que notre pays soit en paix avec lui-même", a déclaré le ministre de la Défense Hervé Morin, avant d'annoncer son projet de loi d'indemnisation. Il s'adresse aux 150 0000 civils et militaires qui ont participé, de 1960 à 1996, aux tirs nucléaires du Sahara puis de Polynésie. Lire la suite…
 

 
Mai 2009 - "Un acte honteux"
 
 
Le 24 avril est la date anniversaire du début du génocide arménien de 1915. Un historien turc ne craint pas de mettre en cause la responsabilité de son pays. Par Taner Akçam.
Le Nouvel Observateur : L'État turc continue de nier le génocide arménien de 1915. Comment votre livre a-t-il été accueilli en Turquie ?
Taner Akçam : La presse turque, qui a fait sa une sur le sujet en novembre 2006, m'a d'abord carrément traité de menteur. Elle refusait de croire que mon titre, "Un acte honteux", était une citation de Mustafa Kemal Atatürk, le père de la Turquie moderne, parlant des actes commis contre les Arméniens. Puis les éditorialistes ont découvert que je disais vrai et m'ont fait des excuses. Le livre est aujourd'hui en vente libre et chacun peut apprendre que Mustafa Kemal a condamné les massacres dès 1919, qu'il a traités de "criminels" Talaat Pacha et Enver Pacha, les Jeunes-Turcs du Comité Union et Progrès (CUP) au pouvoir pendant la Grande Guerre. Plus tard, en 1925, il a même fait pendre une quinzaine de membres du CUP qui projetaient de l'assassiner. Dans les interviews qu'il a données alors à la presse américaine, il les a accusés d'être «responsables de l'assassinat de nos concitoyens arméniens». Cela dit, Kemal n'est pas un militant des droits de l'homme. C'est le fondateur d'un État-nation, qui ne se soucie que de la sécurité d'État et de l'intérêt national, voire nationaliste. Lire la suite…
 

Soldats turcs en 1915 a Alep après la pendaison d’Arméniens en place publique.
 

 
Mai 2009 - Le fond de l'air est... pollué !
 
 

Les lingettes avec lesquelles nous essuyons nos enfants contiennent des agents allergisants. / Il faut aérer… / Tous les ans, 30 000 décès à cause de la pollution de l'air.
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"Nous sommes cernés" et "on a l'impression que l'homme fait tout pour aggraver ses conditions de vie", résumait Benoît Wallaert (hôpital Albert-Calmette de Lille) lors du 4e Congrès francophone d'Allergologie, qui vient de s'achever à Paris. De la rhinite à l'asthme et à toutes sortes d'intolérances, les maladies allergiques connaissent, depuis trente ans, une expansion fulgurante. Car tous les facteurs se conjuguent pour rendre notre milieu de vie insupportable, avec des conséquences parfois graves touchant le nez, les bronches, les yeux ou la peau. Selon l'Ordre national des Médecins, chaque année, 30 000 décès sont imputables à la seule pollution de l'air. Et pour l'OMS, l'allergie figure au quatrième rang des maladies les plus fréquentes. Le professeur Wallaert incrimine d'abord la pollution automobile, avec les particules fines des diesels. Ainsi que la pollution intérieure (habitations et bureaux), due aux composés organiques volatils des aérosols de nettoyage. Aux colles, vernis et peintures. Aux matériaux de construction. La plupart des produits dits d'hygiène, les fumées de cuisine et même les cosmétiques contribuent aussi à l'épidémie. Sans compter les pollens des plantes exotiques et les allergènes répandus par les NAC - les nouveaux animaux de compagnie. Bref aux yeux des allergologues, rien ne trouve grâce, pas même les douces lingettes avec lesquelles nous essuyons nos enfants, dont "la plupart contiennent des agents fortement allergisants".
 
 
Ni les boules de pétanque (qui renferment du nickel). Ni les jacuzzis (favorisant les mycoses). Ni non plus le jogging (avec de redoutables chaussures en caoutchouc). De plus, au nom des économies d'énergie, le soigneux calfeutrage des appartements nous enferme dans des atmosphères empoisonnées. D'où cette recommandation unanime du congrès : il faut aérer, donc ouvrir nos fenêtres à double vitrage. Un point positif toutefois : la raréfaction des moquettes, aujourd'hui passées de mode, réduit notre exposition aux acariens. Ouf ! (Source)
 

 
Mai 2009 - Antilles
 
 
Aux Antilles, "rien n'a changé en termes de rapport de classes et de races", affirmait dernièrement Elie Domota, le syndicaliste guadeloupéen, porte-parole du LKP. "Les 16 de Basse-Pointe", un documentaire de Camille Mauduech, viendrait-il illustrer la pensée de l'ennemi numéro un de la "pwofitasyon" ? A l'origine de cette enquête têtue et subtile, un fait divers martiniquais à l'âpreté faulknérienne. Un sanguinaire "békécide" (meurtre d'un béké) dont Sartre aurait pu s'enivrer dans sa préface aux "Damnés de la terre", où, comme on sait, il dit qu'"abattre un Européen, c'est faire d'une pierre deux coups, supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé : restent un homme mort et un homme libre". En 1948, Guy de Fabrique, administrateur blanc créole de l'habitation Leyritz, se présente, escorté de trois gendarmes, devant une soixantaine de coupeurs de canne en grève. Sur la fausse information d'un mouchard, il vient porter secours à son frère Gaston. Il finit par prendre la fuite. Rattrapé, il est assassiné de trente-six coups de coutelas. On retrouve dans un champ de la plantation son corps - «haché», raconte un témoin. Seize ouvriers agricoles sont arrêtés. Au bout de trois années de détention préventive, ils sont jugés à Bordeaux, où ils encourent la peine de mort. Sur un air de piano Fender Rhodes, avec nonchalance, obstination et un doigt de coquetterie, la réalisatrice assemble le "puzzle disparate" de l'affaire. Mais, soixante ans après, la plupart des accusés sont morts ou séniles. A l'oubli se joint l'omerta des tropiques.
 

Carte postale de 1951 réalisée en soutien aux 16 inculpés de Basse-Pointe. À leur procès, Michel Leiris témoignera sur la misère des Caraïbes… / En 1948, un administrateur blanc est assassiné de trente-six coups de coutelas par des coupeurs de canne.
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On voit ainsi Bibi, le jardinier de l'habitation Leyritz, changée depuis en hôtel, faire une leçon sur l'arbre à cornichons, sans avouer jamais qu'il est le fils d'un témoin coolie du procès de Bordeaux. Guidée par les archives personnelles de l'avocat martiniquais communiste Georges Gratiant, Mauduech parvient à cerner, sinon à percer, toutes les énigmes. Au moment du crime, Guy de Fabrique se disposait-il à tirer sur les grévistes ? Était-il un Nabuchodonosor colonial ou un Meursault créole ébloui par "les cymbales du soleil", comme dit Camus dans "l'Étranger" ? Lire la suite…
 
 
 
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